La princesse Isale était née la première année de l’Ere des Poissons. C’était le deuxième enfant du Roi et de la Reine et, partout dans le pays, on avait fait sonner les cloches pour célébrer l’événement.
Des quatre coins du Vieux Royaume des gens étaient venu pour bénir la nouvelle née : les riches et les nobles, vêtus de leur plus beaux atours, avaient apporté des cadeaux somptueux tandis que les humbles paysans, qui avaient du faire le trajet a pied mais n’auraient pour rien au monde raté l’événement, n’avaient eu que leur chants de fête à offrir. Mais tout le monde, dans la mesure de ses moyens, avait apporté quelque chose.
La Tradition du Vieux Royaume voulait que chaque naissance royale soit une fête pour l’ensemble de ses habitants et que tout un chacun y soit convié. La naissance du Prince Tristan, quelques années auparavant, avait été somptueusement célébrée, comme il se doit pour l’arrivée de l’héritier du Trône d’Ivoire mais, curieusement, il y eu encore plus de visiteurs à rejoindre la capitale pour fêter la naissance d’Isale. Et certains d’entre eux étaient tout à fait inattendus.
Le dernier miracle ayant eu lieu lors de la naissance d’un enfant de sang royal s’était déroulé plus de deux siècles auparavant, lorsque les Trois Sœurs Sorcières avaient béni le quatrième fils du Roi Gerard, le jeune Prince Eric qui allait devenir par la suite le légendaire Chevalier au Dragon.
Le destin allait se manifester pour Isale de façon plus prestigieuse encore.
Alors que les festivités battaient leur plein dans le Palais royal, tandis que les seigneurs et leurs dames levaient leurs verres à la santé de l’enfant, un dernier couple, franchissant les immenses portes du grand hall, vint se joindre au banquet.
Et tous, soudain, s’étaient tus.
Car jamais encore on avait vu Oberon, Seigneur des Fées et des Elfes, ni son épouse, Dame Titania à la verte chevelure, parcourir le sol dallé du Palais Royal. Les immortels souverains, qui gouvernaient déjà leur Terre de Rêves et de Magie bien avant que le Vieux Royaume ne soit fondé, étaient venus, à la stupéfaction générale, apporter leurs vœux pour la naissance d’Isale.
Indifférents aux mortels qui les dévisageaient, avec un mélange de respect et d’effroi, ils avaient donc traversé le grand hall pour rejoindre le Roi et la Reine sur leur estrade. Le Roi avait mit un certain temps avant d’arriver à se donner une contenance digne d’un authentique souverain mais il y était finalement parvenu. Quand le Roi et le Seigneur Fée s’étaient donné l’accolade un soulagement tangible s’était fait sentir dans la salle et, de nouveau, avaient retentis les rires et les applaudissements.
Courtois, Oberon et Titania s’étaient assis à la table des souverains pour partager la suite du banquet et ils avaient même félicité le Ménestrel pour ses créations musicales et ses comptines.
Plus tard seulement dans la journée ils s’étaient rendus auprès de la petite Princesse.
Ceux qui assistèrent à la bénédiction se comptaient sur les doigt d’une main : les deux couples Royaux et le jeune Prince Tristan, alors vieux de huit ans. Mais la Reine était une femme bavarde et, de dames de compagnie en femmes de chambre, la rumeur avait rapidement circulé.
Oberon avait touché la tête d’Isale en la nommant « toute belle » et ce contact avait orné les fins cheveux châtains de la princesse d’une mèche d’or pur. Titania, la prenant dans ses bras, l’avait regardée dans les yeux puis, presque dans un murmure, l’avait appelée « mère des nouveaux jours » et « dernière de son époque », ce qui avait plongé le Roi et la Reine dans la plus grande surprise.
Prenant poliment congé, les Seigneurs du Royaume Magique s’étaient alors éclipsés.
Beaucoup s’étaient interrogés sur le sens à donner à ces paroles énigmatiques.
L’Enchanteur s’était refusé à donner des explications.
Certains pensaient que le silence lui était imposé par les obligations de sa caste, tandis que d’autres disaient que c’était trop hasardeux, même pour lui, de s’aventurer à essayer de déchiffrer les présages des immortels souverains.
Le mystère persistait.